On vit dans un bien curieux pays. Hier, on pouvait lire dans les colonnes de nos confrères de La Provence, cette curieuse question, en guise de titre : « Une super-cagnotte pour Marseille au Département?« . Le sur-titre, tout aussi électoraliste, indiquait : « Municipales : le candidat PS disposerait d’un levier redoutable, la droite fustige son attitude passée ». Avoir la capacité de s’endetter plus encore serait donc assimilé à une sorte de « cagnotte », de « trésor de guerre », de « cassette remplie de pièces d’or »? Est-ce cela? On marche sur la tête !
Les finances de notre pays frisent la banqueroute, celles de la Ville de Marseille et de la Communauté urbaine sont presque en cessation de paiement (on dit en faillite dans le secteur privé), et on fustige un trésor de guerre lorsque l’on trouve une collectivité territoriale, le Conseil général des Bouches-du-Rhône, dont les finances sont saines et la capacité à s’endetter honorable ? Il y a quand même un gouffre entre une capacité d’endettement et une cagnotte secrète non ? N’importe quelle mère de famille comprendra… Voilà donc que l’on est riche si l’on peut devenir pauvre ! A-t-on perdu le sens commun? Avec ce type de raisonnement, on comprend mieux l’état général de nos finances.
De quoi s’agit-il ? Le Conseil général a, depuis les présidences de Jean-Noël Guérini, bénéficié d’une gestion saine de ses finances, choisissant l’augmentation raisonnable de l’impôt et investissant (1er département de France en termes d’investissements) massivement sur le productif et le structurel, contrairement à la Mairie de Marseille ou à la Communauté urbaine, qui ont choisi, elles, d’utiliser les deux leviers financiers que sont l’impôt et l’endettement tout en n’améliorant pas suffisamment la qualité de vie des marseillais. Voilà tout l’enjeu.
Le Cg 13 : 200 millions pour Marseille
La « cagnotte » est donc le type même du faux procès. Sur les 466 millions d’investissements du Département cette année, presque 200 millions ont été accordés, directement ou indirectement, à la ville de Marseille (tramway, routes, Euromed, Hôpitaux, PAM, Aéroport Low Cost, RMI, APA…). Les critiques de Jean-Claude Gaudin ne sont pas fondées lorsqu’il stigmatise son challenger socialiste : « j’aimerais bien que les conseilleurs soient un peu les payeurs » en mettant en exergue que le Cg 13, tout comme la région Paca, n’auraient financé que 6 % (d’ailleurs presque 7%) de son tramway. On peut entendre la critique, on comprend mal alors pourquoi le Département et la Région ont reçu, par la poste, selon les propos de Jean-Noël Guérini sur son blog, et confirmé à la région, la facture de 27 millions d’euros chacune. Sans autre forme de concertation sur le tracé ou la requalification des rues. Si on veut des financements, encore faut-il savoir où les trouver et surtout, comment.
Certes, seuls 49% des marseillais payent l’impôt. Certes, les dettes accumulées depuis l’après-guerre ne sont toujours pas remboursées. Certes, le maire a trouvé des finances moroses à son arrivée à l’Hôtel de Ville. Mais, enfin, que dire des 17000 employés à la ville de Marseille, pour 7000 au département et 5000 à la région ? Alors que la plupart des transferts de l’Etat se sont portés sur les départements et les régions. Que dire de l’opportunité d’un palais de la glisse à Marseille quand les finances sont exsangues ? Que dire d’un tramway (800 millions) qui doublonne le métro, qui ne dessert ni le Sud, ni le Nord de la ville et qui, lorsque l’on s’apprête à ouvrir une nouvelle ligne, fait que l’on découvre le tunnel sous La Plaine non conforme aux normes, dont l’appel d’offres de réhabilitation est retoqué, ce qui fini de plomber la note. On appelle ça une mauvaise gestion des projets et, pour tout dire, une mauvaise gestion tout court. Mais le mot « cagnotte » est lancé, le trésor à portée de main… et les commentaires vont bon train… Tout cela n’est pas sérieux…